Le président tchétchène Ramzan Kadyrov interviewé par Argumenty i Fakty : "Au nom de la loi et de la charia"

Publié le par Podrujka

Extrait de l'interview, disponible dans son intégralité sur le site d'Argumenty i Fakty

 

AIF : Aujourd’hui, la Tchétchénie, comme d’autres république du Caucase du Nord, est une région qui dépend grandement des subventions publiques. Chaque année, le budget fédéral lui octroie des milliards de roubles. Cette situation peut-elle évoluer ?

 

RK : - Aujourd’hui, la république [tchétchène] est à nouveau debout. A présent, nous allons lui apprendre, comme à un petit enfant, à marcher toute seule. Cependant, dès aujourd’hui, nous pourrions nous passer des subventions sans aucun problème. Pour cela, il faut simplement donner à la région la possibilité de disposer des revenus tirés du pétrole qui en est extrait. Je suis sûr que bientôt, si on nous le permet, la Tchétchénie sera excédentaire !

 

AIF : Comment expliquez-vous les attentats de Tsentoroi (le village natal de R. Kadyrov, qui a subit une attaque des terroristes en août 2010) et contre le Parlement (dont les boïeviki ont essayé de s’emparer en octobre) ?

 

RK : - Juste à la périphérie de Tsentoroï, un village ordinaire, il y a une forêt qui va jusqu’à la Géorgie. Il est impossible d’y contrôler les déplacements des gens. Dès que les boïeviki ont essayé d’entre dans le village, ils ont été éliminés. Il n’y avait parmi eux aucun vrai chef de guerre – seulement des «bleus» sans cervelle. Mon seul regret est d’avoir demandé d’enlever les postes de contrôle, parce que j’étais sûr que personne n’oserait attaquer le village. Je le répète, il est possible de pénétrer dans Tsentoroï, mais aucun bandit n’en ressortira jamais vivant. Au Parlement aussi, le groupe a été rapidement éliminé. Il y a des fous partout. Aux Etats-Unis et en Europe aussi, des fous tuent des enfants dans les écoles, abattent des gens dans la rue avant de se tirer une balle dans la tête. Mais il n’y a que chez nous qu’on appelle ces déséquilibrés des combattants pour la liberté ou la foi.

 

AIF : Combien selon vous reste-t-il de combattants en Tchétchénie ?

 

RK : Actuellement, il en reste quelques dizaines. A mon avis, le président Dmitri Medvedev a très bien fait en donnant pour mission de renforcer la lutte [antiterroriste] conjointement au Daghestan, en Ingouchie, en Kabardino-balkarie, etc. Honnêtement, je ne considère pas le district du Caucase du Nord comme le plus problématique. D’ailleurs, les islamistes radicaux – dont se nourrit le terrorisme - existent aujourd’hui dans de nombreuses républiques et provinces du pays. Il faut les combattre non seulement dans le Caucase, mais à Moscou, à Saint-Pétersbourg, au Tatarstan, en Bachkirie et dans d’autres régions.

 

AIF : Des rumeurs courent selon lesquelles vous contraignez les boïeviki à se rendre en retenant leurs proches.

 

RK : Les forces de l’ordre arrêtent les membres des bandes armées et ceux qui les aident, leurs complices directs. Nous interrogeons les gens. S’ils n’ont pas enfreint la loi, on les libère ! On enferme les complices des terroristes comme la loi le prévoit. Par exemple, les sœurs du leader des terroristes Dojou Oumarov vivent à Ourous-Martan et personne ne les touche. En fait, bien souvent, les proches des bandits ne les soutiennent pas. […]

 

AIF : On entend souvent dire qu’en Tchétchénie, les lois russes ne sont pas réellement appliquées. On ne peut pas acheter d’alcool, les femmes sont toutes obligées de porter le foulard, la polygamie est autorisée.

 

RK : Qui dit cela ? Qu’ils viennent et voient par eux-mêmes ! Aujourd’hui, en Tchétchénie, on peut vendre de l’alcool deux heures par jour, entre 8 et 10 heures du matin. Cette règle, comme toutes celles de notre république, ne contredisent pas la Constitution russe. […] A mon avis, il faut limiter drastiquement la vente d’alcool dans tout le pays. Car on sait bien que de très nombreux Russes sombrent dans l’alcoolisme ! Deuxièmement. « Kadyrov a ordonné à toutes les femmes de porter le foulard » ? Je n’ai jamais dit cela même à ma femme ! Nous n’avons pas besoin d’une loi imposée par la force. Toutes mes filles portent volontairement le foulard. L’ainée, qui va avoir 12 ans, s’habille déjà comme le veulent la religion et les coutumes locales. Ainsi, elle préserve l’honneur et la dignité de la famille. Pour la polygamie, c’est plus compliqué. En pratique, les autorités ne peuvent ni la « bénir », ni l’abolir, car il s’agit de la vie privée. Je ne cache pas qu’en tant que musulman profondément croyant, je ne suis pas un adversaire de la polygamie. De plus, en Tchétchénie, depuis la guerre, il y a beaucoup plus de femmes que d’hommes. Il faut qu’elles puissent fonder un foyer.

 

AIF : De nombreux hommes politiques renommés se sont maintes fois prononcés en faveur de l’indépendance des républiques du Caucase du Nord. Quelle est votre position ?

 

RK : Il ne faut pas faire s’effondrer le pays, mais au contraire, conduire une politique commune. Sans le Caucase, la Russie ne saurait exister ! C’est sa frontière, sa beauté et sa force. Les Tchétchènes ont fait leur choix au moment du référendum. Va voir n’importe-quel habitant d’ici, donne-lui une mitraillette et propose-lui de se détacher de la Russie. Il t’enverra te faire foutre ! Et il viendra tout nous raconter.

Publié dans Caucase

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